Tous les mois, l'écrivain Brunoh vous offre une nouvelle, qui nous rappelle, au-delà des données macro-économiques, que la recherche d'emploi constitue, avant tout, l'histoire personnelle de millions de femmes et d'hommes… La vôtre, peut-être ?
Cette nouvelle, comportant précisément 2011 signes, a participé à la 11ème biennale de Lyon (du 15 septembre au 31 décembre 2011), dont le thème était :
Une terrible beauté est née
Je déteste le mot peau.
Il rappelle ce qui sue, ce qui sent (j’allais écrire « ce qui sang »).
La peau fait penser à l’animal, elle évoque la fragilité d’une couverture putrescible, qui finira, tôt ou tard, par nourrir les vers.
Comme j’aimerais l’échanger contre une carapace de métal, brillante, vernie, inaltérable !
Les organes mous et vils pourraient se lover contre l’acier froid, certains seraient remplacés par leurs équivalents mécaniques, d’autres simplement connectés et nourris de fluides synthétiques.
Plus d’ingestion, de digestion, d’excrétion… Juste la paisible certitude de l’infini.
Débarrassée de l’emprise du temps, la beauté prendrait un caractère absolu, d’une pureté telle que le design d’êtres humains deviendrait le summum de la création artistique.
La fonction ne créerait plus l’organe : c’est l’organe qui engendrerait la fonction.
Les besoins matériels seraient remplacés par des désirs esthétiques…
La transition ne fut pas simple.
Nous avions prévu plusieurs stades de développement.
Le premier consistait à mettre en place le corpus idéologique : les vivants non conformes seraient éliminés.
Le culte d’une beauté synthétique s’imposa en quelques décennies. Les rides, les fluides, les imperfections devinrent intolérables, y compris aux yeux des anciens beaux, qui se virent décatir avec désespoir.
Leurs descendants furent les premiers à vouloir expérimenter la transition.
Il fallut éliminer ces millions de carcasses humaines, devenues inutiles.
Les charniers furent déplacés dans des zones où les populations non conformes se terraient. Laisser pourrir sous leurs yeux les restes des élus symbolisa notre victoire.
Lorsque les premiers d’entre nous foulèrent des pieds cette planète, nous nous rendîmes compte que notre perfection ne pouvait souffrir la présence d’animaux recouverts de fourrure, sans parler de ces végétaux aux formes torturées.
L’écrin n’était plus à la hauteur du bijou.
Ce que nous avions pris pour un aboutissement n’était que le début d’une belle histoire…
(Source : Journal l'offre d'emploi Alsace - Janvier 2012)
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